Les Disonnants | La voix de l'écologie radicale

Le Prince Charles en a rêvé… nous l'avons fait !

Protestation sur la surconsomation à Paris

La voie de la radicalisation

À maturer

Publié le par Margaux


Dissonante,

parce que je milite pour une société écologique intégrale. Mais alors que je n’ai ni ferme, ni chèvre, que je ne vis pas en ZAD, ni même dans une communauté, que j’ai un travail salarié aliénant…

…De quel droit me réclamer du mouvement écologique ?
Ce droit, celui de parler, je le prends. 

Nous aurons toujours une bonne excuse pour ne pas prendre part au débat, pour ne pas nous sentir légitime à exposer nos idées. Assumer ses dissonances est un outil formidable pour reprendre le pouvoir sur le jugement de l’autre et sur l’auto-jugement. Si nul n’est parfait, il semble important toutefois de connaître les lieux de nos imperfections, et plutôt que de les blâmer, les questionner. Quels sont les solutions pour minimiser l’impact de ses imperfections me demanderez-vous ? Pas d’impatience, elles viendront plus tard.

La dissonance est inhérente au statut de militant.

“C’est pas ma faute à moi, c’est la faute au système.”

Le système, pourtant, j’en profite (en quelque sorte). Mon confort actuel, ma position dominante de jeune française blanche de pas trop mauvaise famille, ma position sociale pas si éloignée des élites parisiennes, m’offrent les ressources et le temps de la réflexion. Devant l’urgence climatique, nous n’avons plus le temps, il n’est plus question d’avoir honte de notre position, mais de la questionner en profondeur. Je crois que je peux faire partie de la classe dominante et vouloir bannir toute forme d’oppression. C’est après tout cette position et le temps que m’offre cette position qui me permettent aujourd’hui de questionner mes privilèges, bon vieux paradoxe…

La magie de la dissonance écologique, c’est qu’avant, nous étions des innocent.e.s. Citons Jésus pour le plaisir : “Heureux soit les innocents : ils iront au paradis.” : sans réflexion, point de dissonances.

Devenir écolo, dans une société dominée par le néo-libéralisme, amène forcément à un certain nombre de dissonances, n’en déplaise aux puristes. La majeure partie du monde vit sous l’occupation capitaliste, devenir écolo, c’est petit à petit, remettre en question son mode de vie, oui ; mais devenir dissonant.e, c’est penser l’écologie comme une intégralité, remettre en question non seulement son comportement, mais surtout son individualité, son identité, ses valeurs, et tout ce qui a pu participer à forger ces dissonances. Devant le nombre d’injustices accumulées, la seule solution qui devienne envisageable est d’entrer en résistance.

Devenir dissonant, c’est l’acte courageux d’interroger sans limites les profondeurs de notre culture individuelle et collective.

Être dissonant c’est une culture de la réflexion profonde, qui transcende l’absurdité, cette réflexion est ancrée dans le réel.

Être dissonant, c’est une philosophie. La philosophie de la remise en question, proche du déconstructivisme, mais libérateur, émancipateur, créateur

Nous sommes des Colibris qui avons réellement l’intention d’éteindre le feu. Des colibris qui sont conscients de leur inefficacité de Colibris. Nous ne nous satisfaisons pas des bonnes intentions. Nous sommes réalistes. Cette réalité nous pousse aujourd’hui à admettre que nous allons droit dans le mur. Être dissonant, c’est avant tout accepter de déconstruire les rouages de la société, mettre à jour l’implicite, l’inaperçu pour réinterroger les présupposés et ouvrir de nouvelles perspectives. C’est vouloir démonter et déraciner les mythes et les systèmes de pensée qui nous imposent un certain point de vue aveuglant et qui nous empêchent d’avancer sur le chemin de l’écologie. C’est remettre en question la manière dont un système et son idéologie nous ont appris à réfléchir. C’est arrêter de se mentir, ne plus avoir peur d’aller jusqu’au bout d’une réflexion. Ce jusqu’au boutisme peut être vu comme une radicalité, comme un extrémisme. Mais comme nous sommes libérés du jugement des autres par notre auto-jugement dissonant, nous n’avons plus peur des mots, plus peur des étiquettes. Nous nous revendiquons de la pensée écologique intégrale, radicale, philosophique et déculpabilisée.

La pensée écologique n’est pas une pensée radicale contre un système. C’est le système de pensée lui-même qui est radicalement différent. Notre point de vue est tout autre, et notre système de réflexion n’est sûrement pas que politique, que philosophique et ne se réfère pas qu’à une écologie scientifique biologique ou sociale. C’est une culture, une culture non pas de la radicalité mais du vivant. Si cette culture issue de la pensée écologique est radicale aujourd’hui, c’est par nécessité et par urgence uniquement.

Admettre que quelque chose dans notre comportement ne convient pas, c’est pousser la réflexion toujours un peu plus profondément, et mettre en lumière ce qui nous empêche de vivre selon nos valeurs écologiques :

individuellement, et COLLECTIVEMENT.

On remet en cause notre culture.
On déconstruit, tout. Et ensuite ?

Ensuite c’est la plus belle partie, celle où libérés de tous les récits qui confortent leurs positions aux dominants, nous inventons. On s’invente une culture écologique, des récits fondateurs, une écriture, une philosophie et une parole qui incluent le vivant et les différences, un nouveau modèle d’alimentation, des fêtes, des rites, on se reconnecte à la vie, on accepte la mort, on s’inclut à ce qu’on appelait Nature, on permet le développement d’un art et d’une expression artistique éthique et politique, on revoit le système éducatif pour permettre à toutes les formes d’intelligence de s’épanouir, on propage des idées, des réflexions… 

Dieu est mort, (Nietzsche), sortez de votre innocence :
croire au développement durable et aux énergies renouvelables, croire aux politiciens et aux industriels, c’est croire au mythe du super-héro scientifique, en la supériorité des hommes qui gouvernent, c’est croire en Dieu.
Pour les plus récalcitrants, Jésus est déjà venu pour vous sauver : plus personne ne viendra.

L’effondrement, nous y sommes, il n’y aura pas de grand soir, arrêtons d’attendre auprès des industriels pour qu’ils libèrent l’invention géniale, soit-disant déjà sous le coude, qui va tous nous sauver. Le moment venu, ce n’est pas nous qu’ils viendront sauver.

La culture écologique est devenue essentielle. Oui elle fait peur, oui elle est déprimante, oui elle provoque forcément une perte de repères et une souffrance passagère devant la prise de conscience de notre impuissance.

Mais la culture est une arme. Le soft power écologique peut exister si nous agissons à faire évoluer nos systèmes de valeurs.